Petit jardin d'humour




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l'homme qui faisait des boustrophédons

"Prix du Marais" en 2004 décerné par les lecteurs des médiathèques de Lille et de Lomme (France - Nord - 59)

 

Petite odyssée d'un petit homme au pays des petites gens.

Le ton : Humour sépia.

Situation :     

Un facteur amnésique et tétraplégique part en expédition dans ses souvenirs.

L'histoire :     

Monsieur Léon retourne le temps et les phrases. Pour retourner le temps il utilise le calendrier de la Poste comme Alice le miroir. Pour retourner les phrases il fabrique des boustrophédons, des phrases qui n'ont ni queue ni tête. Ou plutôt des phrases dont la queue devient la tête... Ou alors, l'inverse ? ... Enfin, c'est à vous de voir ...

Extrait

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    Ensuite, on récitait les prières du soir, debout devant le crucifix fixé au mur, puis les enfants montaient dans leurs chambres. Paulo, Olga et Marthe demeuraient encore une bonne heure dans la cuisine. Marthe lisait des romans de Paul Bourget et de Pierre Lhermitte, Olga tricotait et Paulo cousait des kroumirs. Paulo était un virtuose du kroumir, sorte de mocassin en peau retournée que l'on enfilait avant de chausser les sabots. Pour fabriquer ses kroumirs, Paulo récupérait la peau des lapins qu'on élevait dans un petit cabanon. Après les avoir débarrassés de leur graisse avec une lame de verre, il remplissait de paille les peaux de lapin retournées et les faisait sécher un bon mois sous le pigeonnier, hideuses poupées boursouflées où les grosses mouches vertes se donnaient rendez-vous. Puis il trempait les peaux dans un bain d'alun et les laissait sécher, tendues sur une planche par quatre clous. Quand les peaux étaient bien sèches, Paulo découpait au moyen d'un sécateur les formes approximatives des kroumirs qu'il cousait, le soir, avec une alêne de cordonnier. Les soirées étaient laborieuses et un peu nauséabondes. Son art aboutissait à la réalisation d'objets incertains, blanchâtres et squameux à l'extérieur, mais douillets à l'intérieur et bien utiles dans les sabots qui chaussaient toute la famille quand elle n'allait pas "en ville".

    Pour Olga, Marthe et Marie, Paulo avait fabriqué des kroumirs "de luxe" en peaux de taupes. Il avait fallu une hécatombe de taupes et des heures de guet dans le jardin, au-dessus des taupinières, très tôt le matin, la bêche à la main. Mais le résultat n'était pas sans charme :

- Il vaut mieux avoir l'air con et chaud aux pieds que d'attraper des rhumes ! disait souvent Paulo en enfilant voluptueusement ses kroumirs aux formes cauchemardeuses.

    Son rêve eut été de vivre en autarcie et il appuyait ses leçons d'économie domestique sur des principes décisifs :

- On ne gaspille pas ! Gaspiller est un péché, une injure fait au Bon Dieu. Gaspiller c'est un vice de riches.

    Et les enfants, résignés et culpabilisés, avalaient en vitesse les croûtes de pain qu'ils avaient sournoisement abandonnées sous leur assiette !

Aphorismes et sentences étaient péremptoires :

- Quand on est à la campagne il faut être imbécile ou fainéant pour mourir de faim !

ou encore :

- Les poubelles des vrais pauvres sont toujours vides !

    En conséquence, la famille Bayart déployait une énergie inventive sans faille pour récupérer tout ce qui était récupérable, et même le reste. Les eaux usées, entreposées dans un vieux fût métallique servaient à arroser le jardin ; les emballages de carton étaient découpés en fines lamelles qui, tressées, se transformaient en ficelles ; les déchets de cire des bougies étaient fondus et coulés dans un moule en bois autour d'une mèche en ficelle de carton...

    Jamais tête de Bayart n'avait été confiée au coiffeur ; Olga coupait les cheveux de Marthe et de Marie avec des ciseaux de couturière, Marthe lui rendait le service et, les veilles de fêtes, les dames se décoraient mutuellement de rouleaux antiques : on appelait cela, assez pompeusement, "se faire des frisettes".

    C'est Paulo qui, avec une vieille tondeuse édentée, héritée de sa mère, débroussaillait, à l'arraché, les tignasses des garçons avant d'abandonner son propre chef à Olga avec un stoïcisme exemplaire. On portait volontiers le cheveu long chez les Bayart, chacun repoussant le plus longtemps possible les séances de scalp.

    Le dimanche, on grillait sur la flamme du réchaud les pattes de poules données par le fermier voisin. Débarrassées de leurs écailles, les pattes donnaient au bouillon dominical de vagues saveurs de consommé de volaille.

    Deux fois par an, un foulard sur le nez, équipé de récipients hétéroclites fixés au bout de perches de bois, Paulo vidait, dans la bonne humeur, la fosse d’aisances sur le potager :

- On ne pourra pas dire qu'on gaspille quelque chose ! disait-il, au milieu de son champ d'épandage, avec la sérénité des gens qui ont fait leur devoir.

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Informations Editeur

L'homme qui faisait des boustrophédons , roman de Claude Daubercies .

 ISBN 2-910834-19-0 :- 140 p.  18 euros

 les Éd. du Bon Albert

A commander chez votre libraire habituel ou aux Editions du Bon Albert, 48260 Nasbinals.

Expéditions par retour du courrier franco de port.

 



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